Les plateformes destinées à favoriser les liens amicaux se multiplient face à l’érosion de la popularité de leurs homologues dédiés à la recherche de l’âme sœur.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, il est possible en 2024 – et depuis quelques années déjà d’ailleurs – de se trouver des amis sur le web tel que l’on va faire ses courses à la boulangerie du coin.
Autrement dit, il existe une base de données où chacun pourrait puiser des amis selon ses affinités. Ou plutôt, des plateformes spécialisées dans la facilitation de cette démarche. L’application de rencontres Bumble a ainsi racheté en mai dernier, Geneva.
Il se définit comme un groupe de chat « qui vous connecte aux personnes que vous souhaitez rencontrer aux activités que vous souhaitez mener dans votre ville ». Cette acquisition intervenant presqu’un an après le lancement de « Bumble For Friends » renseigne sur la stratégie de la marque américaine : explorer le créneau de l’amitié.
« Ce n’est que le début de notre stratégie pour étendre le spectre de notre groupe et aider les gens à former des connexions au sens large », renseigne à cet effet la patronne Lidiane Jones, citée par le site d’information Stratégies.
L’amour n’unit plus
Cette initiative intervient alors que l’industrie du dating en ligne semble en perte de vitesse par rapport à son pic en 2021, lorsque la pandémie du Covid et les restrictions sanitaires y afférentes avaient renforcé le besoin de créer des liens.
Match Group, maison-mère de Tinder et Meetic entre autres, a vu s’évaporer plus de 40 milliards de dollars de valorisation depuis lors, à en croire Stratégies. De quoi motiver le lancement aux États-Unis de « Yuzu », une application ciblant la communauté asiatique et proposant aussi bien des rencontres amicales qu’amoureuses.
En France, ce même groupe expérimente depuis octobre un service dédié à l’amitié sur « DisonsDemain », sa plateforme destinée aux seniors.
« Tinder notamment s’adresse à un public jeune, entre 18 et 22 ans, une tranche d’âge qui préfère faire des rencontres en personne plutôt qu’en ligne », estime Seema Shah, responsable chez Sensor Tower, société spécialisée dans l’analyse de l’économie numérique, interrogée par l’AFP.
Un créneau pérenne ?
« On arrive au bout d’un cycle. Les gens, maintenant veulent plus d’authenticité et de contact direct », témoigne Arthur Czubinski, traducteur de 32 ans, rencontré par Stratégies lors d’un dîner organisé par l’application française Timeleft.
Pour Bumble, les retombées se révèlent spectaculaires. Alors que l’application de dating traditionnelle voit son nombre d’utilisateurs fondre de 8%, sa version amicale enregistre une croissance vertigineuse de 540% sur un an, rassemblant jusqu’à 730 000 utilisateurs mensuels actifs au troisième trimestre 2024, selon Sensor Tower.
Mais des doutes émergent quant à la pérennité d’un tel modèle, dont le boom serait davantage lié à la nouveauté, selon certains.
« Je doute que les gens acceptent de payer dans la durée« , prévient Seema Shah, soulignant qu’il reste « plus facile de se faire des amis dans son quartier, en faisant une activité ou à son travail, sans débourser d’argent ».