Sanae Takai revendique dormir très peu, affirmant consacrer tout son temps à ses fonctions. De quoi susciter l’indignation dans un pays marqué par le fléau du travail excessif.
Sanae Takaichi a beau avoir 64 ans, elle reste au taquet. La Première ministre japonaise a ainsi convoqué ses collaborateurs au bureau à 3 heures du matin il y a quelques jours afin de préparer une audition budgétaire prévue seulement six heures plus tard.
Cette pratique qui pourrait sembler inhabituelle pour le commun des mortels n’a pourtant rien de nouveau pour cette dirigeante du Parti libéral-démocrate (PLD). Pour la nouvelle cheffe du gouvernement, il s’agit d’une routine, un mode de vie taillé dans le marbre de l’ancien credo japonais : « travailler, travailler, travailler« .
Interrogée par des parlementaires sur sa stratégie pour enrayer la culture des journées interminables, Takaichi a esquivé en exhibant ses cernes.
« Je dors environ deux heures par nuit maintenant, quatre heures au maximum« , a déclaré celle qui représente la première femme de l’histoire à s’être hissé à la tête d’un gouvernement au pays du Soeil levant, tout en admettant que « c’est probablement mauvais pour ma peau. »
Une Première ministre modèle… d’un système épuisant
La Première ministre attend d’ailleurs la même implication de son équipe, leur demandant de « travailler comme des chevaux ». Ce discours, que l’on pourrait admirer ailleurs, prend une tout autre résonance au Japon, pays marqué par un long héritage de surmenage, au point d’avoir forgé le terme « karoshi » (« mort par excès de travail »).
La société japonaise reste profondément ancrée dans une culture professionnelle valorisant les horaires interminables et les soirées de sociabilité obligée. Une étude publiée à l’occasion de la Journée mondiale du sommeil en mars a révélé que les Japonais dorment en moyenne 7 heures et 1 minute par nuit, soit 38 minutes de moins que la moyenne mondiale.
Ils dorment ainsi moins que les Américains, Britanniques, Français, Allemands, Italiens ou Canadiens.
L’impasse du « toujours plus »
À l’échelle du pays, ce modèle a des répercussions multiples. Les couples épuisés, qui cumulent heures supplémentaires et temps de transport, peinent à « faire leur part » dans la lutte contre la baisse de la natalité, comme le souligne The Guardian.
Dans ce contexte, la posture de Sanae Takaichi interroge et suscite des critiques. Même si elle jure que « toute évolution des conditions de travail donnera la priorité à la santé des salariés » et décrit comme idéal un modèle où chacun pourrait « concilier correctement garde d’enfants, responsabilités familiales, travail, loisirs et temps de détente ».
Ken Saito, ancien ministre de l’Économie (PLD), s’est dit « sincèrement inquiet » pour sa santé, tandis que le député d’opposition Katsuhito Nakajima l’a exhortée à accorder davantage de place au repos.
