Édouard Philippe dans l’engrenage judiciaire

L’affaire qui éclabousse le maire du Havre et président du parti Horizons prend un tournant décisif avec le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile par la fonctionnaire à l’origine des révélations.

L’étau judiciaire se resserre progressivement autour d’Édouard Philippe dans l’affaire qui l’oppose depuis 2023 au Parquet national financier (PNF) pour « prise illégale d’intérêts, détournement de fonds publics, favoritisme, concussion et harcèlement moral ».

Le maire du Havre et fondateur du parti Horizons est accusé par une haute fonctionnaire de la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole qu’il préside. L’affaire, révélée par cette administratrice territoriale reconnue lanceuse d’alerte par la Défenseure des droits en janvier dernier, porte sur de graves soupçons de contournement des règles des marchés publics.

En cause : une convention signée en juillet 2020 entre la communauté urbaine et l’association LH French Tech, dirigée par Stéphanie de Bazelaire, adjointe d’Édouard Philippe.

Une offensive à multiples enjeux

Malgré les alertes répétées de la plaignante – surnommée « Judith » – sur les dysfonctionnements de l’association, le projet s’est poursuivi. La communauté urbaine a finalement versé 1,15 million d’euros sur les 2,154 millions initialement prévus.

« M. Philippe a rectifié le tir trop tard. Il a donc manqué à ses responsabilités à deux reprises : il aurait dû refuser de signer la convention et de valider ce montage initial, et à tout le moins la rompre bien plus tôt, et il a laissé perpétuer cette gestion hasardeuse pendant près de deux ans », dénonce Judith dans une note de septembre 2022 adressée au maire et jointe à sa nouvelle plainte avec constitution de partie civile déposée le 20 juin dernier.

« Il nous apparaît primordial, sur le plan stratégique, d’obtenir la désignation d’un juge d’instruction afin de pouvoir faire des demandes d’actes dans le cadre d’une procédure contradictoire, avec accès au dossier », explique de son côté au Monde, Jérôme Karsenti, le nouvel avocat de la plaignante.

Édouard Philippe sur la ligne de crête

Cette offensive judiciaire vise à donner plus de droits et de pouvoir d’action à la fonctionnaire, dans l’espoir d’obtenir une enquête plus approfondie. Des perquisitions ont déjà eu lieu à l’hôtel de ville du Havre et au siège de la communauté urbaine.

Ce nouveau développement de l’affaire, dans laquelle Judith affirme avoir subi « des pressions, humiliations et pratiques vexatoires », pourrait sérieusement compromettre la réputation d’Édouard Philippe et ses ambitions présidentielles pour 2027.

L’ancien Premier ministre, qui fustige habituellement les petits arrangements de l’ancienne politique, se retrouve à son tour accusé d’avoir organisé un système de favoritisme au profit de ses proches. Une ironie cruelle pour celui qui a fait de la « probité » son cheval de bataille dans sa conquête de l’Élysée.

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